Face à la progression du variant BA.2, il est urgent d’accélérer l’accès aux antiviraux

Michel Goldman 22 mars 2022

Comme l’indique le Risk Assessment Group (RAG) dans son rapport du 16 mars, le variant BA.2 continue sa progression dans notre pays où il représente déjà plus de deux tiers des cas de COVID-19. Le RAG souligne que la situation actuelle pourrait conduire à de nouvelles surcharges dans les hôpitaux et chez les médecins généralistes, notamment en raison de l’augmentation parallèle des cas de grippe saisonnière. Dans ce contexte, il est indispensable d’accélérer l’accès aux médicaments anti-viraux pour réduire les hospitalisations des patients les plus vulnérables. C’est l’objet d’une interview conjointe avec le professeur Cogan, publiée dans le Journal du Médecin : https://bit.ly/JdMpaxlovid

Rappelons ici les caractéristiques principales du variant BA.2

  • transmissibilité accrue, responsable d’un accroissement du nombre d’infections, qui est également lié à la levée des mesures sanitaires ;
  • moindre sensibilité aux vaccins disponibles mais la vaccination avec rappel (booster) protège les personnes des formes les plus graves pour une durée qui reste à préciser et pour autant que leur système immunitaire fonctionne normalement ;
  • résistance au sotrovimab (Xevudy), seul traitement proposé aujourd’hui en Belgique aux personnes immunodéprimées ;
  • sensibilité à l’Evusheld, combinaison d’anticorps utilisés pour la prévention chez les personnes immunodéprimées. Il n’est pas encore disponible en Belgique alors que 16 000 personnes en ont déjà bénéficié en France, suite à une approbation transitoire d’urgence par la Haute Autorité de Santé. D’autres pays ont fait de même alors que la Belgique a adopté une attitude attentiste: elle attend la décision de l’EMA, que l’on espère proche, pour confirmer sa commande de 10 000 doses.
  • sensibilité au Paxlovid, destiné aux immunodéprimés et patients âgés avec comorbidité. La Belgique annonce avoir commandé 10 000 doses mais qui ne sont pas encore délivrées faute de conclusion du contrat avec Pfizer. Disponible en France qui en a commandé 500 000 doses.

Stratégies face à la progression du variant BA.2

  1. Vaccins :
  • Améliorer encore la couverture vaccinale globale, en particulier des personnes les plus vulnérables, y compris les enfants avec comorbidité.
  • Stimuler l’administration des premiers rappels/boosters (« 3è dose »)  chez les personnes qui ne l’ont pas encore reçu
  • Deuxième rappel (« 4è dose ») : pas d’évidence qu’il se justifie chez tout le monde, mais indiqué chez les sujets les plus âgés, en particulier avec comorbidité.
  1. Encourager le port du masque dans les endroits clos, même s’il n’est plus obligatoire 
  1. Insister sur la bonne ventilation des endroits «à risque»

Ces trois éléments sont bien repris dans la note du Risk Assessment Group. De façon très surprenante, cette note ne fait pas mention du 4è élément important, un accès rapide aux médicaments anti-viraux pour protéger les personnes les plus vulnérables. Il fait l’objet de notre « plaidoyer » résumé ci-dessous.

  1. Médicaments

4.1. Paxlovid :

  • Conclusion sans délai du contrat avec Pfizer ;
  • Mise en œuvre dès maintenant de la communication vers les médecins prescripteurs, en particulier sur la nécessité d’une administration précoce et la gestion des interactions médicamenteuses ;
  • Préciser dès maintenant les démarches administratives qui seront imposées, qui ne devront pas retarder l’administration du traitement qui est d’autant plus efficace qu’il est donné précocement.

 4.2. Evusheld

Puisque l’option d’une autorisation transitoire accordée par l’AFMPS/FAGG n’a pas été retenue et que l’on anticipe une approbation prochaine par l’EMA (communication du 15 mars de l’agence), organiser dès maintenant le dispatching des 10 000 doses commandées aux patients concernés, en espérant une livraison rapide.

4.3. Molnupiravir : rediscuter son utilisation proposée dans les maisons de repos et aux patients ambulants dans le cadre d’une étude dont les contours sont imprécis (voir site Task Force-KCE : https://kce.fgov.be/fr/balises-pour-le-traitement-m%C3%A9dicamenteux-du-covid-19  Ce médicament n’est plus recommandé en France qui a annulé ses commandes en raison d’une efficacité insuffisante.

4.4. Sotrovimab

Son utilisation devrait être suspendue à bref délai, compte tenu des grands doutes quant à son action à l’égard du variant BA.2 dont la dominance s’accentue.